lundi 1 juillet 2013

Mieux qu’une monarchie : la démocratie sans le peuple…


Christian VannesteLa Révolution avait pour but essentiel de faire passer la France d’une société d’ordres, de castes, de privilèges, de corporations et de confréries à une nation de citoyens égaux en droits. Ce n’était pas la monarchie qui était contestée, laquelle a survécu à la nuit du 4 août, moins à celle de Varennes. Elle a encore été célébrée sous sa forme constitutionnelle lors de la fête de la Fédération du 14 Juillet 1790 que nous commémorons tous les ans le jour de la fête nationale. Mais, dieu merci, la Restauration est en marche. Nous avons toujours un monarque, élu, une Marie-Antoinette qui aurait plutôt le statut de la Pompadour, et dont certains, mal intentionnés, craignent une influence à la
légitimité douteuse. Mais surtout, nous avons enfin retrouvé le charme de la monarchie finissante, ses affaires du collier, ses lettres de cachet pour embastiller les récalcitrants à la pensée unique, sa justice à deux ou trois vitesses, sa confrérie de la manchette, son oligarchie politique et financière qu’il ne viendrait à l’idée de personne d’appeler « aristocratie », ses finances délabrées, son endettement monstrueux, sa complexité administrative parcourue par les délicieux fumets de succulents fromages. Que plus de deux siècles après la Révolution, la France ait sauvegardé une personnalité aussi constante montre à quel point il était inutile de s’interroger sur l’identité nationale. Certes, elle n’est plus cette grande monarchie chrétienne, le plus puissant des États européens. Certes, son monarque est le Président d’une République, mais il est tout autant que son lointain prédécesseur prisonnier de l’impuissance du pouvoir. Ce sont des détails : la cour est plus que jamais présente et avec elle la caste faisandée qui nous dirige à la godille, un coup à gauche, un coup à « droite ». Son image dans le monde est intacte : le Pays des Droits de l’Homme ? Vous voulez rire ! Celui du luxe, des parfums et du vin, de la licence des moeurs et de la corruption drapée de beaux discours moralisateurs, bref, une société civilisée, un peu décadente, mais qui en tire un charme fou.

« Comme les aristocrates de l’Ancien Régime nourrissaient les philosophes qui allaient les perdre, par le même snobisme, les fortunes d’aujourd’hui financent l’essaim de gauchistes qui peuple de nombreuses rédactions. »

Son portrait a peu changé. La tête est toujours aussi grosse et a même encore enflé. Tout se décide dans notre beau pays entre les portes de Clignancourt et d’Italie, enfin entre la Place des Vosges et le Jardin de Luxembourg. C’est là que se croisent les élus influents, ou influencés, les journalistes vedettes, les juges indépendants, mais politisés, les hauts-fonctionnaires carriéristes, les penseurs et écrivains mondains sans oublier les hommes d’affaires avisés qui financent les gazettes où écrivent les pas encore ci-devant journalistes qui influencent les pas encore ci-devant ministres. C’est dans ce terreau choisi que naît la pensée à la mode, les idées de quelques-uns qui vont devenir l’opinion de tous, la connivence de bon ton des gens qui comptent. Ne pas s’y référer, c’est courir le risque d’être un « beauf », un ringard, ou, plus grave, un conservateur. Comme les aristocrates de l’Ancien Régime nourrissaient les philosophes qui allaient les perdre, par le même snobisme, les fortunes d’aujourd’hui financent l’essaim de gauchistes qui peuple de nombreuses rédactions. Lénine disait que les capitalistes étaient si bêtes qu’ils achèteraient la corde avec laquelle on allait les pendre. C’est Lénine qui était bête : les soixante-huitards maoïstes ou trotskystes qui mènent la danse médiatique s’entendent comme larrons en foire avec des patrons mondialistes pour qui le progrès rime avec l’absence de limite et de frontière, de Marrakech à New-York. La libération de 1968 est réalisée dans le bonheur… pour qui en a les moyens. C’est ce que nos révolutionnaires ont compris en ralliant le côté des moyens. Reste le peuple… les Dupont-Lajoie qui vivent dans leurs quartiers pourris, en attendant d’être remplacés par d’autres. « Après moi le déluge », disait, paraît-il, Louis XV. Quand je vous disais que rien n’avait changé depuis 89. Il voulait du pain. Pourquoi pas de la brioche ? Il veut du boulot, et on lui offre royalement des emplois aidés.

« La gauche fait, la droite ne défait pas. »

La nouveauté, ce sont les élections : des États-Généraux à répétition. Pas grave pour le moment : la gauche fait, la droite ne défait pas. Le référendum est tenu à distance. On jouit d’un pouvoir qui se distingue de plus en plus de la responsabilité puisque des tas de gens qui ne sont pas élus peuvent justifier les décisions désagréables ou l’incapacité de prendre les nécessaires. De l’Europe à la CNIL, une myriade d’instances, d’autorités et d’observatoires en tous genres offrent des retraites confortables et des alibis en or. La démocratie sans le peuple est la plus délicieuse des monarchies. En France, des millions de personnes ont défilé et continuent de se mobiliser contre une loi voulue par la cour et exigée par certains courtisans. Le mépris a très royalement accueilli ce regrettable désordre. Mais tranquillisons-nous : la France n’est pas isolée. Le même processus est à l’oeuvre ailleurs. Ne vient-on pas d’apprendre de nos médias ravis que dans le pays du gentil Obama, une petite majorité de la Cour Suprême, des juges « désignés » avaient piétiné le vote par référendum des électeurs californiens et autorisé le mariage de deux lesbiennes. L’événement a eu lieu après cinq ans durant lesquels le peuple avait – quel scandale ! – suspendu l’application des droits de l’homme. Heureusement la nouvelle conception de ces « droits » n’a plus rien à voir avec le droit naturel et la raison : ils sont désormais plastiques et évolutifs et peuvent à chaque fois permettre de dire au peuple : « C’est le droit ! On ne te demande pas ton avis de facho potentiel ! » 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire