Les prétentions des idéologues sinon à la mode du
moins énoncés tels montent dorénavant aux extrêmes faute de prise sur le réel,
sur ce qui "est" sensible pour des millions de personnes (sensations
diffuses et aussi très précises d'insécurité culturelle, politique,
économique…). Ainsi autant nier pour eux encore plus celles-ci plutôt que de se
remettre en cause.
Loin de se demander par exemple pourquoi l'Afrique a bien du mal à se
développer alors que l'Asie fait bien mieux (toutes choses égales par ailleurs)
il convient de mettre en cause d'abord la (dé)colonisation, -surtout refuser
d'admettre que le colon blanc n'est pas l'inventeur de la domination
(masculine) générale et en particulier (l'esclavage) jusqu'à reprocher
pour finir à autrui ce que l'on est devenu en vue d'extirper de soi ce que
l'Histoire a enfanté en soi, comme si le passé d'avant la colonisation était
pétri d'une authenticité existentielle telle qu'il faudrait à tout prix le
ressusciter.
Il y a là des ferments d'ultranationalisme à rebours qui ne sont pas le
seul apanage des "blancs déclassés ou revanchards" et qui viennent se
cristalliser (comme dans les années 60 et les années 30…) dans l'idée qu'un
retour aux "ancêtres" qui permettrait de "retrouver la grandeur
de leurs racines" comme si celles-ci pouvaient garantir la possibilité de
maîtriser un présent si honni.
La montée aux extrêmes de ce que l'on peut appeler le post-tiers-mondisme
anti-moderne totalitaire d'un côté et le courant
identitaire anti-moderne, totalitaire, anti-assimilationniste et
remigrationniste de l'autre côté est telle qu'ils en viennent, aux
avant-gardes, à sombrer à la fois dans la nostalgie d'un passé soit
pré-colonial soit prémoderne, passé magnifié et aux défauts toujours exogènes
ou psychiques (critique de la "mollesse" supposée quelle soit
"bourgeoise" pour les uns, "métèque, rationaliste" pour les
autres) jusqu'à balayer ce que la modernité et la colonisation ont pu apporté
de "positif", réfutant jusqu'à sa dimension critique alors que
celle-ci charrie aussi des analyses et des comportements qui remettent
précisément en cause l'idée d'une supériorité en soi d'une ethnie sur une
autre, d'une civilisation sur une autre, d'un modèle de développement sur un
autre. La critique "du" capitalisme mondialisée est née en Europe,
pas ailleurs.
Il est vrai cependant que sur certains points, il est possible de
soutenir que notre civilisation européenne
aux fondements gréco-latins et
judéo-chrétiens baignée d'influences anglo-saxonnes, germaniques, ibériques,
slaves,scandinaves, mauresques, a réussi après maints conflits à se hisser à
une dimension universaliste positive au sens (comtien)
d'être capable d'apporter des solutions pour tous les humains au-delà de leurs
cultures spécifiques qui nécessairement se confrontent depuis à cet apport pour
l'intégrer ou le refuser.
Ce dernier cas est précisément le lot, d'une part, de ce
post-tiers-mondisme aidé en ce sens par le postmodernisme néo-léniniste issu de
l'effondrement soviétique ; et loin de comprendre pourquoi leur projet
respectif a échoué ou échoue actuellement (castrisme, bolchevisme, maoïsme,
nationalisme arabe, islam radical, bolivarisme…) ces courants tentent
désespérément de susciter maintenant l'affrontement racial, en sus de leur
volonté de continuer à détruire de l'intérieur arts, langues, capacités de
penser, différences sexuelles, dans une ultime tentative de mettre à bas la
société moderne plurielle, tolérante, ouverte, soucieuse du développement
personnel de chacun et ce par essence (terme qu'ils honnissent), au
sens qu'elle se trouve posée (l'essence étant
la substance en tant que posée à un moment donné de l'histoire de l'Esprit
disait Hegel) comme affinement même de la substance "Europe" enrichie
d'apports divers puis reformatant l'ensemble dans le projet moderne voire néo-moderne
d'aujourd'hui proposé au monde entier comme fond morphologique le
tout au-delà des formes spécifiques qu'il prend politiquement et des conflits,
permanents, propres aux passions humaines déchaînées lorsqu'elles ne sont pas
tenues en interne comme en externe.
Ces tentatives extrêmes issues de la "gauche" alimentent bien
sûr les réactions diverses venant de la "droite", tels donc ces
courants identitaires anti-assimilationnistes et remigrationnistes nostalgiques
eux aussi d'un âge d'or ancestral, d'une magnificence, celle de cet empire
romain germanique unifié si brièvement par Charlemagne, avec en arrière fond la
lutte entre partisans de l'Empereur et partisans du Pape, entre la tentation
théocratique et la tentation absolutiste posant l'État comme "République
ecclésiastique" (Hobbes que reprend ensuite Hegel puis Kojève y voyant
Staline comme cet Empereur conciliateur ou les affres actuels d'un…Douguine…).
Sauf que, à la décharge de ces "identitaires", divers et
variés, il s'avère que les médias, ces vecteurs si importants pour la
formation de la perception et des échanges symboliques, loin de faire la part
des choses entre nécessité et liberté, conservatisme et aventurisme,
crispations et réelles difficultés d'intégrer des modèles culturels
incompatibles du point de vue des droits universaux arrivés à stance par la
Modernité démocratique mondialisée, les médias, ces nouveaux bardes, basculent,
en majorité, plutôt du côté des extrémistes post/tiers-mondistes et
postmodernes, ce qui fait qu'alimenter la rage des extrémistes dits
"identitaires" de l'autre bord.
D'où chez ces derniers la résurgence à nouveau de cette idée simpliste
voyant "les" médias comme autant d'outils de propagande manipulés par
un complot à la fois maçonnique, juif, libéral, puisque les logiciels
médiatiques sont fabriqués par les matrices principalement post-tiers-mondistes
post-modernes et néo-léninistes, cachant la complexité du réel, portant au
pinacle des courants ultra-minoritaires tels ces "décolonialistes"
revers de la médaille djihadiste/gauchiste au sens d'en être les porteurs de
valise qui seront bien sûr massacrés le moment venu, mais qui en attendant
versent de l'huile sur le feu, exprès, afin d'arriver à cette guerre des
"races" susceptible de transcender de renouveler la guerre des
classes que d'aucuns tentent d'insuffler également, déjà en mettant au pas les
syndicats jugés par "essence" trop "réformistes"….
Ce manque, évident, de culture générale, d'histoire des idées, charrié
par la majorité des médias fait que ces derniers ne voient pas que l'actuelle
"réaction" envers les "no borders" se nourrit du fait que
ces derniers non seulement confondent toutes les migrations mais surtout ne
voient pas ou plutôt ne veulent pas voir que tant que le modèle intégrationniste/assimilationniste
à dimension universaliste (mais non uniformisant) reste en panne, l'arrivée de
nouveaux modèles culturels remettant en cause les acquis civilisationnels
qu'incarnent par excellence le droit des femmes et la liberté d'expression pose
un problème crucial si crucial que de plus en plus de populations européennes
rejettent ce fait accompli, même si, pour l'instant, le moteur de ce refus
vient bien plus du refus de se voir imposer des modes de vie incompatibles avec
les acquis civilisationnels que le fait en soi d'ostraciser l'étranger en tant
que tel.
Mais les médias mainstream aidés abreuvés submergés par
la supposée bonne conscience des no borders post tiers-mondistes
refusent de voir cette réalité ; ils préfèrent plutôt alimenter leur modèle
pourtant si destructeur jusqu'à susciter non seulement leur propre
auto-destruction (ainsi la plupart des médias compagnons de route du
néo-tiers-mondisme postmoderne sont tenus à bout de bras telles des danseuses
par la subvention publique ou par l'endettement massif des magnats aux ordres)
mais aussi l'arrivée au pouvoir de courants identitaires qu'il est plus aisé de
cataloguer de "populiste" ou "d'extrême droite" que
d'analyser leur poussée ; ce qui a pour résultat de mieux encore les faire
monter le tout en vue de reproduire la scène des années 30 ultime possibilité
de se refaire une santé au sein d'une supposée alliance anti-fasciste alors que
les données sont totalement différentes, la chasse (relative) aux métèques
étant ici principalement défensive (en particulier à l'Est) et non pas
offensive d'une part, tandis que, d'autre part, il s'agit plutôt de refuser de
se voir imposer des modèles culturels incompatibles ou artificiels comme cette
idéologie du "trans" posée comme obligatoire, l'identité n'étant plus
qu'une consommation parmi d'autres de "traits" à assembler dans un
portrait éphémère et à crédit.
Est-ce que cette tentative de modélisation forcée va marcher comme elle
a failli réussir dans les années 30 ? Tel est l'imbroglio du bégaiement actuel
et sa farce.
Le 20/12/2017
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