Dans le règne sans fin de Pépère premier, nous sommes tombés de Charybde en Scylla. Avec application, François Hollande aura mis un point d’honneur à passer, en toute circonstance pour le plus parfait des abrutis. La décision qu’il vient de rendre dans l’affaire Jacqueline Sauvage, alors que le monde se remettait à peine de la mort de Georges Michael, en est la plus parfaite démonstration. Pour comprendre la portée de cette « grâce totale » présidentielle, il convient de s’arrêter sur quelques principes qui sont, hélas, absents des séances de propagandes dispensées par l’Éducation nationale sous le terme galvaudé « d’éducation civique ». Dans un État de droit, le monopole de la violence légitime appartient précisément à l’État, à lui, et à personne d’autre. Toutes les questions soulevées par la classe bêlante, à l’occasion des procès de Madame Sauvage tournent autour de cette notion fondamentale. Sous prétexte qu’elle subissait depuis des dizaines d’années, la violence de son mari, Jacqueline Sauvage avait elle le droit de le tuer ? François Hollande vient de répondre oui
et cette réponse soulève bien des questions.
Un meurtre reste un meurtre
Résumons les faits. Lassée de subir les violences de son époux, un beau jour Jacqueline Sauvage se saisit de l’arme de chasse de ce dernier et lui tire trois balles dans le dos. Ce faisant, la « brave dame » se rend coupable de meurtre avec préméditation. En d’autres termes, plutôt que de saisir les autorités, elle a préféré se saisir d’une arme pour se faire justice elle-même et c’est LA raison pour laquelle la Justice l’a condamnée et maintenue en détention, en dépit des cris d’orfraie de tout ce que le monde politico-médiatique compte de consciences galactiques. En l’absolvant, François Hollande vient de mettre à bas le monopole d’État de la violence légitime, rien de moins.
Évacuons tout de suite, la requalification des faits à laquelle se livre nos grandes âmes. Non, Jacqueline Sauvage n’était pas en état de légitime défense. Pour invoquer cette circonstance atténuante, il n’aurait pas fallu monter une arme de chasse pour tirer ensuite, à trois reprises, dans le dos d’un individu fût-il abject. Notons au passage qu’une telle arme ne comportant que deux coups, il faut vider les cartouches et recharger pour en tirer un troisième. Nous sommes donc plus près de l’acharnement prémédité que de la légitime défense. On nous explique ensuite que, victime de violences conjugales répétées, elle n’avait pas la force de demander l’aide de la Justice. Elle a tout de même trouvé celle de prendre une arme à feu, elle avait donc un peu de caractère… Compte tenu de ces circonstances, la peine qui lui a été infligée n’était ni disproportionnée ni injuste, cette dernière notion ne figurant du reste pas dans le code pénal. Comme dans le jeu bien connu des dominos, gracier la condamnée entraine tout un tas de réactions en chaine que le pouvoir socialiste agonisant et les idiots utiles qui ont appelé à cette décision sont bien loin de mesurer.
La jurisprudence Sauvage
En vérité, les « avocats » de Jacqueline Sauvage (je parle des professionnels de l’indignation, pas des professionnels du droit, eux n’ont fait que leur métier) ont obtenu ce qu’ils voulaient : faire de ce meurtre ordinaire, le symbole de la lutte contre les violences faites aux femmes. Si le combat est légitime, l’icône est catastrophique et se retournera tôt ou tard contre la cause. Pour que ce cas ait servi à quelque chose, il aurait fallu plusieurs facteurs cumulatifs :
- Que Mme Sauvage ait, en vain, tenté d’alerter la justice sur sa condition de femme battue,
- Que son mari ait, une nouvelle fois, levé la main sur elle, en mettant sa vie en danger,
- Qu’elle lui ait, de ce fait, ôté la vie en défendant la sienne.
Un meurtre avec prémédication, érigé au rang de symbole, ne sert qu’à justifier la violence privée, ce qui peut très bien se plaider, mais pas sous les oripeaux de l’État de droit.
Il va maintenant être bien compliqué d’expliquer au père d’une fille violée et assassinée (épinglé au « mur des cons » d’un syndicat de « magistrats ») qu’il n’a pas le droit d’émasculer le tortionnaire de son enfant, lorsque celui-ci aura « purgé sa peine ». Il ne va pas être plus simple de faire un meurtrier, d’un bijoutier ayant abattu un de ses braqueurs. Dans la même veine, il va être intéressant de voir les contorsions des ministres de l’Intérieur successifs, pour justifier le fait que la légitime défense n’est jamais un a priori, lors de l’utilisation de l’arme de service d’un policier, même lorsque « des sauvageons » tentent de l’immoler. Enfin, par pure charité chrétienne, je ne m’appesantirai pas trop sur le fait que les contempteurs du droit à se débarrasser par balle d’un mari violent soient les mêmes qui nous abrutissent depuis des années sur le scandale que constitue la peine de mort …
De la politique de caniveau
Sachant tout cela, pourquoi François Hollande — qui est idiot, mais pas ignorant — a-t-il pris le risque d’ouvrir, à ce point, la boite de pandore ? Au vue de ses multiples hésitations sur le même sujet, le moins que l’on puisse dire c’est que ce n’est pas une décision impulsive. Un coup je rejette la grâce, un autre je l’accorde partiellement et à la fin : je gracie totalement. Le Roi dit nous voulons ! Une analyse rapide tendrait à conclure que, ne se représentant pas et n’ayant donc que faire des institutions qu’il avait pourtant juré de servir, pépère s’assoit dessus pour se faire de la popularité à bon compte. Mais à quoi cette popularité pourrait-elle bien lui servir, puisqu’il n’y retourne pas ?
En vérité, depuis qu’il a renoncé à prendre une branlée aux primaires – qu’il n’a pas su éviter – le Hill Billie du Faubourg Saint-Honoré organise en sous-main un intéressant bruit de fond qui consiste à instiller le doute sur le caractère irréversible de ce choix. Venant d’un homme qui n’a jamais été fichu de prendre une décision et de s’y tenir, cela n’a rien de très surprenant. Depuis la publication des chiffres du chômage qui — sans baisser — se contentent de ne plus monter, les quelques rares soutiens du polygame « n’excluent rien » et surtout ne soutiennent personne dans la pantalonnade destinée à désigner le candidat socialiste.
La stratégie est limpide. Si, ce qui est probable, personne (ou presque) ne vote et qu’aucun impétrant ne sort nettement du chapeau fin janvier, le Président périmé se sentira légitime pour « céder à l’amicale pression de ses amis » et faire don de son corps d’albâtre, à la France pour un nouveau mandat de 5 longues années. C’est dans cet objectif qu’il faut analyser cette grâce ahurissante. Le plus fascinant là dedans, c’est qu’il a raison. Il n’est qu’à lire le flot de conneries qui se déverse depuis sa décision de majesté, pour s’apercevoir que plus personne ne s’en remet à la raison. De droite comme de gauche, celles et ceux qui ont à cœur la défense des femmes (ou dont le silence pourrait laisser à croire que cette cause leur importe peu) bêlent à l’unisson, pour louer la clairvoyance du calculateur.
Mettre à bas des siècles de construction du droit, pour pouvoir se présenter à une élection en dit très long sur les motivations du personnage. Car, soyons réalistes, même s’il est candidat, Hollande a de fortes chances de perdre. Ceci étant, s’il ne l’est pas, il a toutes les chances de ne pas gagner. Qui ne tente rien n’a rien et la place est bonne ! Après nous avoir inondé de moraline et seriné ses « moi Président » le génie de Tulle se livre à une manœuvre — très mitterrandienne au demeurant — pour tenter sa chance, envers et contre tout et tous. Peu importe les dégâts collatéraux, seul le résultat compte. Les intérêts à l’œuvre doivent être très puissants, pour s’en remettre à pareil gambit. Faut-il qu’il n’ait pas envie que l’on découvre la réalité de son règne, pour tenter de se maintenir sur son trône à pareil prix. Nous sommes au moins sûrs d’une chose, c’est que Pépère est en bonne santé. Il sait qu’il ne pourra pas attendrir son successeur, comme Mitterrand a su si bien le faire avec Chirac, pour éviter d’avoir à rendre des comptes. Il faut donc qu’il tente sa chance… ne soyons pas dupes !
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