Jusqu’à quand la France se paiera-t-elle de mots ? Jusqu’à quand ses dirigeants tenteront-ils de faire croire aux Français que, grâce à leur action, la politique européenne se réoriente vers la croissance ? Dernier en date de ces rêves éveillés, la conviction que le sort de l’Europe dépend de la conquête par la France du poste de commissaire européen aux Affaires économiques : avec un tel allié dans la place, Paris pourrait enfin desserrer l’étau de rigueur dans lequel le pays s’est enfermé tout seul.
Pierre Moscovici connaît bien les affaires européennes, c’est entendu. Il maîtrise également les codes, us et coutumes de la planète économique et financière. Mais, dans l’hypothèse
vraisemblable où il deviendrait le commissaire français, les contre-performances de la France et son rôle de frein à la croissance européenne ne donneraient aucune légitimité à Paris pour revendiquer le poste clef des dossiers économiques.
Et si, déjouant ces pronostics et à la faveur d’une combine comme seule Bruxelles sait en produire, la France arrachait par extraordinaire ce portefeuille ? Cela ne changerait rien : isolé parmi 27 autres commissaires dont plusieurs anciens Premiers ministres, le représentant français n’aurait aucune marge de manœuvre pour épargner son pays. On peut même penser que sa parole et ses inévitables rappels à l’ordre budgétaire résonneraient alors plus cruellement encore aux oreilles de ses camarades socialistes.
C’est un fait : l’influence de la France est en recul. Aucun président de groupe parlementaire à Strasbourg (il y a 4 Allemands sur 8), de moins en moins de hauts fonctionnaires à des postes de direction d’administration ou de cabinets, le décrochage économique de la France se répercute concrètement dans les instances interunationales. Avant de rêver à nouveau de grandeur, la France devrait se réveiller.
Nicolas Beytout
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