« Dans un chemin montant,
sablonneux, mal-aisé, (c’est la crise) et de tous les côtés au soleil exposé,
(c’est la mondialisation), six forts chevaux (les acteurs économiques) tiraient
un coche… Une mouche survient, et des chevaux s’approche, prétend les animer
par son bourdonnement, pique l’un, pique l’autre, et pense à tout moment qu’elle
fait aller la machine… Aussitôt que le char chemine, et qu’elle voit les gens
marcher, elle s’en attribue uniquement la gloire, va, vient, fait l’empressée…
» Dessiné par La Fontaine, ce portrait de François
Hollande est saisissant. Notre Président va et vient dans les
provinces, et annonce la reprise et l’inversion
de la courbe du chômage. Son
dernier bourdonnement : « quelque chose se passe »… Oui, trois choses en
l’occurrence. D’abord, des signaux positifs viennent des États-Unis : fin
juillet, le niveau de chômage était le plus bas depuis 2008. Durant le mois,
200 000 emplois privés avaient été créés par les entreprises, 17 000 de plus
que prévus. Avec une hausse des ventes de 14%, le secteur automobile retrouvait
la forme. Afin de maintenir un climat optimiste, la FED annonçait la poursuite
de ses injections monétaires (85 millions de dollars par mois). Les taux
d’intérêt demeurent bas et les bourses se réveillent. Si l’on peut s’inquiéter
du caractère artificiel et fragile de cette reprise, il s’agit du résultat de
décisions prises par l’administration et par la banque centrale des États-Unis.
L’Euroland n’a pas les mêmes instruments, ni les mêmes capacités, puisque sa
banque centrale a pour priorité la lutte contre l’inflation et que l’Europe n’a
pas non plus de politique économique, mais des politiques, plus ou moins
intelligentes et anticipatrices, des directives plus ou moins contraignantes et
un fouillis de règlements qui freinent plus qu’ils n’accélèrent la croissance.
Elle pourra néanmoins mécaniquement bénéficier de la reprise américaine et de
la hausse du billet vert qui en sera la conséquence logique. En second lieu,
les perspectives s’améliorent déjà également en Europe. Hors zone euro, la
politique menée par David Cameron au Royaume-Uni porte ses
premiers fruits. La croissance est de 1,4% en glissement annuel après un second
trimestre à 0,6%. La production manufacturière a progressé de 1,9% au premier
semestre, les ventes de voitures de 12,7% au mois de juin. Les services, la
distribution et le marché du logement donnent des signes encourageants.
Évidemment, la banque centrale britannique, imitant celle des USA, annonce
qu’elle ne relèvera pas ses taux tant que le chômage ne descendra pas
au-dessous de 7%. Dans la zone euro, il y a aussi de bonnes nouvelles. Le
moteur allemand tourne plus vite, avec une augmentation de 2,4% de la
production industrielle en juin et un excédent commercial qui bondit de 3
milliards à 16,9 par rapport au mois de mai. Globalement, l’indice européen des
directeurs d’achats dépasse pour la première fois depuis 2011 le niveau de 50
qui témoigne d’un secteur manufacturier en expansion. L’Espagne enregistre le
cinquième mois consécutif de baisse du chômage et le Portugal connait un
premier recul de 17,7 à 16,4% au second trimestre. Enfin, l’expansion galopante
de la Chine se modère avec un effet bénéfique sur le coût des matières
premières. Le ralentissement chinois qui se traduit par une baisse des
exportations et de l’excédent commercial devrait également amener Pékin à réorienter
la croissance vers le marché intérieur pour atteindre son objectif de 7,5%
nécessaire à la stabilité sociale du pays. C’est une opportunité pour nos
exportations.
« S’il se passe quelque chose, comme le dit ce bon
Monsieur Hollande, c’est ailleurs qu’en France. »
Ainsi, s’il se passe quelque chose, comme le dit ce bon Monsieur Hollande,
c’est ailleurs. La France touchera évidemment sa part de la reprise, mais ce ne
sera pas la sienne et on peut s’inquiéter de l’importance de cette part.
Certes, elle va quitter à nouveau la zone de récession, mais avec des chiffres
minables. La Banque de France pronostique un très modeste 0,1% de croissance au
troisième trimestre, et l’INSEE un recul de même niveau sur 2013. Il faut bien
sûr espérer une amélioration de ces résultats, mais politiquement on doit
souligner l’inefficacité et la malhonnêteté de nos dirigeants. Pour justifier
notre seconde récession au premier trimestre de cette année, ils désignaient
l’environnement européen comme responsable. L’OCDE dans son dernier rapport
parle au contraire d’une dynamique de croissance stable pour la France,
délicieux euphémisme pour évoquer la stagnation, mais souligne les inflexions
positives de l’Allemagne et de l’Italie. Autrement dit, si des choses se
passent, c’est pas chez nous et notre Président compte bien sur les retombées
de ce qui se passe chez les autres pour améliorer son tableau. Je doute
cependant qu’il cite alors l’environnement européen comme cause de cette
embellie. Il aura sans doute le front de dire qu’on l’a enfin entendu, et qu’on
passe de l’austérité à la croissance. La réalité, c’est au contraire que les
pays qui ont fait preuve de sérieux au travers d’une politique d’assainissement
visant à réduire la dette et son coût au moyen d’une diminution de la dépense
publique ont eu raison et que la France, pendant ce temps a bricolé avec une
boîte à outils comprenant de nouvelles aides publiques et de nouveaux impôts
pour les financer. Certes, l’importance de notre secteur public et la
limitation de la population active et du temps de travail améliorent nos
chiffres de manière illusoire, mais l’absence de réformes structurelles
courageuses et la politique brouillonne menée dans notre pays seront aussi des
freins à l’heure de la reprise dont on peut se demander si elle sera durable,
tout en constatant qu’elle est plus forte dans des pays qui ont pratiqué
l’austérité, et surtout chez ceux qui ont toujours la maîtrise de leur monnaie,
comme le Royaume-Uni.Pour en revenir à La Fontaine et à sa mouche, il conclut ainsi : « Ainsi, certaines gens, faisant les empressés, s’introduisent partout dans les affaires, ils font partout les nécessaires ; et partout importuns devraient être chassés. » Il faudrait que les Français suivent ce conseil !
Cordialement,
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire