dimanche 19 janvier 2014

De la communication présidentielle selon Christian Vanneste

Le spectacle a montré le talent de l’artiste. On avait fini par oublier que c’est ce talent-là qui fonde le professionnalisme des politiciens. Qu’un chef d’État, parmi les plus visibles dans le monde, accablé par les échecs de sa politique, affaibli par la révélation d’une vie « privée » scabreuse, en chute libre dans les sondages, maîtrise sa communication comme si de rien n’était, a entraîné chez beaucoup de commentateurs, déjà enclins à la connivence, une retenue presque admirative. L’acteur avait bien répété. À force de faire du scooter, il a réussi à garder son casque pour ne pas entendre les questions gênantes, et amorcer un virage social-démocrate dans le brouillard d’orientations imprécises.
On peut résumer cette très longue prestation en trois mots. Le premier est« responsabilité ». Un observateur attentif aurait souligné que c’est une qualité qui fait superbement défaut chez le
Président. Évoquer la situation épineuse qu’il a provoquée comme s’il s’agissait d’une épreuve à laquelle il était soumis, se présenter comme une victime qui affiche une indignation magnanime et l’exigence d’un respect qu’on aurait aimé lui voir témoigner, sont autant de façons d’évacuer sa responsabilité. Il fait de même sur le plan politique en mettant la situation économique et sociale actuelle sur le dos de ses prédécesseurs, en oubliant le « détail » de la crise et en tentant de faire passer ses dix-huit mois d’errements pour une période de redressement du pays.
Reste le pacte de responsabilité. Il s’agit de celle des entreprises qui devraient se sentir responsables de la création d’emplois dès lors qu’on diminue leurs charges. L’effort demandé aux entreprises n’est pas précisé. Comment sera-t-il contrôlé ? On sait que la diminution concernera les cotisations familiales. On ignore, en revanche, comment elle sera compensée. Par un recul de la politique familiale ? Le Président dément. Mais au moment où la fécondité recule et compte tenu des dispositions déjà prises dans ce domaine, notamment la baisse du plafond du quotient familial, on peut penser qu’un spécialiste du contre-sens peu motivé par cette politique est capable du pire.
On notera que la fin des cotisations patronales « famille » était la contrepartie de la TVA sociale. On arrive donc au même objectif, mais par des méandres compliqués et incertains. Le relèvement du taux de TVA ayant eu lieu, ce seront les économies qui financeront la famille. Lesquelles ? On ne sait pas, mais rassurez-vous braves gens, un « machin », comme il est rituel d’en annoncer à chaque conférence de presse, va être créé. Le Conseil Stratégique de la Dépense va chercher le trésor caché, caché chez les autres, notamment les collectivités territoriales majoritairement socialistes et si généreuses avec l’argent public et les dotations de l’État. Demain, elles seront moins socialistes et l’État moins généreux.
Pour l’instant, le scooter effectue donc un virage essentiellement sémantique. Il n’est plus socialiste, mais social-démocrate. Cela signifie admettre que le discours de la prise du pouvoir était soit utopique soit hypocrite. Il fallait faire payer les riches, les grosses entreprises, les gros contribuables rendre la demande plus juste. On va maintenant faire payer tout le monde pour permettre à la production, à l’offre de se relever.
Le troisième mot, c’est l’Allemagne, ou plutôt l’Europe, mais les deux sont désormais synonymes et plaisent particulièrement aux centristes.Les Français vont devoir se convertir à la compétitivité des Allemands. Ces derniers vont laisser les premiers faire la guerre, parce que celle-ci leur donne des boutons, comme l’inflation. Ayant beaucoup donné, ils sont devenus allergiques. Pour l’énergie, on peut difficilement trouver une plus grande divergence qu’entre le spécialiste du lignite et celui de l’atome. Enfin, l’Euro est un sous-Mark idéal pour l’Allemagne et un sur-Franc dont nous souffrons. Il faut approfondir et non plus élargir, dit le Président. Il est trop tard pour l’un et l’autre. Il faut aujourd’hui défaire ce qui a été mal fait.

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