jeudi 23 janvier 2014

Pour une République à la gomme ?

Ecrit le 22 jan 2014 à 10:21 par Christian Vanneste dans Poing de vue
 
Christian VannesteLe 21 janvier 1793, comme le pensait Renan, la France s’est suicidée en coupant la tête de son Roi. Elle venait de manquer l’instauration d’une monarchie constitutionnelle apaisée qui a si bien réussi au Royaume-Uni, notre grand rival victorieux du XVIIIe siècle. Depuis elle reste prisonnière d’un schéma historique fondé sur des révolutions violentes et des changements de régime plus ou moins déterminés par des guerres perdues. A défaut de réaliser les réformes nécessaires, certains imaginent une bien inutile VIe République. La gauche demeure inconsciemment animée par le mouvement qui a agité le pays entre 1789 et 1794 : toujours plus à gauche. La droite trouve dans le marais son meilleur modèle du passé : ne rien faire au pouvoir et survivre dans l’opposition. Mais, comme les faits sont têtus, la gauche, rappelée à la réalité sur le terrain économique, continue sa marche de somnambule là où l’idéologie se heurte moins vite et moins clairement au réel : la société et les mœurs. Le progrès a ainsi pris la forme de la transgression des valeurs traditionnelles, héritées notamment de la religion catholique qui a joué
un rôle considérable dans l’identité de notre pays. Mais cette identité évidente, inscrite dans notre patrimoine, la gauche la nie parce qu’elle s’accroche farouchement à sa furie destructrice des identités. Paradoxalement, c’est justement la seule identité qui lui reste.
On connaît la mésaventure révolutionnaire du marquis de Saint-Janvier, privé de son titre, de son saint, et de son mois et devenu le citoyen Nivôse avant de perdre la tête. Il y a dans cette anecdote teintée d’humour noir une illustration du progrès tel que la gauche le conçoit plus ou moins consciemment : une égalité apparente dont l’instrument est la gomme. La théorie du genre abolit les différences physiologiques et hormonales, notamment, qui distinguent l’homme de la femme et les rendent complémentaires. Prétendant contre tout bon sens que cette identité sexuée est issue d’un conditionnement social, elle conduit à conditionner les enfants à abandonner leur identité de garçon ou de fille. De même, la destruction systématique du modèle familial monogame, constitué d’un père, d’une mère et de leurs enfants, nié par la loi et par l’exemple jusqu’au plus haut niveau de l’État, fait advenir des générations d’individus flottant entre des solidarités incertaines, entre des noms livrés au hasard et à l’arbitraire et des prénoms sortis des séries américaines en vogue. Jean ou Marie, fils ou fille « de » étaient plus à même d’asseoir chez une personne le sentiment de son identité. Multicarte des nationalités, citoyen de résidence, sans patrie que ni l’école ni le service national ne lui auront enseignée, le petit « français » sera soumis à toutes les tentations, du départ vers les paradis fiscaux jusqu’à celui vers les enfers djihadistes, « national » de nulle part et de partout, pratiquant un sabir vaguement francophone et baragouinant au moins l’anglais. Venu en France par hasard ou par intérêt, l’étranger sera davantage chez lui dans sa communauté de quartier que dans cet espace national en voie de dislocation entre grandes régions et Europe fédérale. Il y retrouvera éventuellement mosquée et minaret. Mais la laïcité à la gomme aura interdit la crèche dans les lieux publics et jusqu’au nom de Noël pour la fête de l’hiver. Lorsque le Souverain-Pontife recevra le Président de la République, il s’agira de la rencontre de deux chefs d’État, dont le second veut oublier que son pays a été bâti comme un royaume chrétien, que le baptême de Clovis avait voué à être le glaive, parfois encombrant, du Pape.
Le progrès consiste donc à arracher une à une les racines chrétiennes de notre mode de vie. A commencer par le respect pour la Vie comme valeur, si l’on excepte celle des criminels. Au nom de l’égalité entre l’homme et femme, on va considérer que cette dernière a un droit de vie et de mort sur la personne en devenir qu’elle porte, qui n’est pas un « morceau » d’elle mais le fruit de deux personnes dont l’une est exclue. Curieuse égalité ! La notion de détresse était la dernière marque de respect pour la vie. L’Assemblée va l’abolir. À l’autre bout de l’existence, le droit de tuer, sauf les criminels, sera établi. Entre deux, le mariage aura été réduit à la reconnaissance sociale d’un sentiment plus ou moins passager et pas forcément univoque, qui ne possédera même plus d’intérêt patrimonial, et laissera donc la place à d’autres situations. L’exemple nous en est donné au sommet, sous la protection d’une vie privée payée par l’argent public, notamment dans ce haut lieu de la République qu’est Versailles. Est-ce parce que le vin est attaché au rite catholique ? La gauche lui préfère le cannabis, qui fait des ravages chez les jeunes de notre pays, les plus gros consommateurs européens, ainsi exposés aux risques pour leur santé, leur travail scolaire, et les accidents de circulation. Mais rien ne vaut ce plaisir iconoclaste de gommer les images de notre pays, les frontières  et les limites qui permettent à une personne d’être quelqu’un de quelque part plutôt qu’un client anonyme. Client de l’État ? Client des multinationales ou des « machins » fédéraux, peu importe, citoyen à la gomme, en tout cas.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire