lundi 27 janvier 2014

Le Moyen-Orient : l'homme malade du monde

r Daniel Pipes

The Washington Times
24 janvier 2014
Version originale anglaise: The Sick Middle East
Adaptation française: Johan Bourlard
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La chute de Falloujah en Irak, tombée récemment aux mains d'un groupe lié à Al-Qaïda, rappelle le souvenir amer des ressources et des vies consacrées entre 2004 et 2007 par les Américains au contrôle de la ville – autant d'efforts qui n'ont servi à rien. De la même manière, les centaines de milliards de dollars dépensés pour la modernisation de l'Afghanistan n'ont pas empêché la libération de 72 prisonniers auteurs d'attaques contre des Américains.
La prise de Falloujah, en Irak, par Al-Qaïda.
Ces deux exemples illustrent un constat plus général : les maux affectent si profondément le Moyen-Orient (à l'exception notable d'Israël) que les puissances étrangères ne peuvent y remédier. En voici un rapide aperçu :
L'eau est en train de manquer. Un barrage en construction sur le Nil Bleu en Éthiopie risque gravement de couper l'Égypte de sa principale source d'approvisionnement en eau en engloutissant des tonnes d'eau pendant des années. La Syrie et l'Irak souffrent de crises liées à l'eau en raison de l'assèchement du Tigre et de l'Euphrate. Au Yémen, la culture du qat, plante narcotique, y absorbe tellement les ressources en eau
déjà limitées que Sanaa pourrait devenir la première capitale moderne à être abandonnée pour cause de sécheresse. En Arabie Saoudite, les systèmes mal pensés de culture du blé ont épuisé les nappes aquifères.
À l'opposé, le barrage mal conçu de Mosoul en Irak menace ruine et risque de noyer directement un demi-million de personnes et d'en priver plus encore d'électricité et de nourriture. Gaza est envahie par les eaux usées. De nombreux pays subissent des coupures d'électricité et particulièrement durant les chaleurs estivales accablantes qui atteignent régulièrement les 50 degrés.
Représentation du grand barrage éthiopien de la renaissance, actuellement en construction.
La population est également en train de manquer. Après avoir connu une explosion démographique perturbante, la région voit à présent ses taux de natalité s'effondrer. L'Iran, par exemple, a subi la plus forte chute de taux de natalité qu'un pays ait jamais connue, passant de 6,6 naissances par femme en 1977 à 1,6 en 2012. Cela a créé ce qu'un analyste appelle une « panique apocalyptique » qui nourrit l'hostilité de Téhéran.
Le dénuement des écoles, la répression exercée par les gouvernements et l'archaïsme des mœurs génèrent des taux de croissance économique ridicules. La famine menace l'Égypte, la Syrie, le Yémen et l'Afghanistan.
Les énormes réserves de pétrole et de gaz ont dénaturé presque tous les aspects de la vie. Les minuscules monarchies de type médiéval comme le Qatar deviennent des puissances mondiales surréalistes qui jouent à la guerre en Libye et en Syrie, sans tenir compte des vies qu'elles brisent, alors qu'une foule de travailleurs étrangers opprimés et exclus travaille dur et qu'une princesse consacre à l'acquisition d'œuvres d'art un budget inégalé dans l'histoire de l'humanité. Les privilégiés, protégés par leurs réseaux et leur argent, peuvent assouvir leurs envies cruelles. Le tourisme sexuel dans les pays pauvres comme l'Inde se développe.
Al-Mayassa bint Hamad bin Khalifa Al-Thani (née en 1983), sœur de l'émir du Qatar et présidente de l'Autorité des Musées du Qatar, consacrerait annuellement environ un milliard de dollars pour ses dépenses en œuvres d'art.
Les tentatives pour instaurer la démocratie et la participation politique tournent à l'échec comme en Égypte ou portent au pouvoir des fanatiques qui dissimulent adroitement leurs objectifs, comme en Turquie. Les tentatives pour renverser des tyrans cupides amènent soit des tyrans idéologiques pires encore (comme en Iran en 1979) soit l'anarchie (comme en Libye ou au Yémen). En général on soutient les deux camps pour perdre et l'État de droit demeure un mirage.
L'islamisme, qui est actuellement l'idéologie politique la plus dynamique et la plus menaçante, est illustré par une déclaration morbide adressée par le Hamas aux Israéliens : « Nous aimons la mort plus que vous n'aimez la vie. » La polygynie, la burqa, les mutilations génitales et les crimes d'honneur font des femmes au Moyen-Orient les plus opprimées au monde.
La vie au Moyen-Orient est marquée par des préjugés tenaces – souvent officiels – fondés sur la religion, la confession, l'ethnie, la tribu, la couleur de peau, la nationalité, le genre, l'orientation sexuelle, l'âge, la citoyenneté, le travail et le handicap. L'esclavage demeure un fléau.
La vie politique dans la région est dominée par les théories du complot, le zèle, le ressentiment et la répression politiques, l'anarchie et l'agressivité. Les notions modernes relatives à l'individu demeurent marginales dans des sociétés où les liens familiaux, tribaux et claniques restent dominants.
Alaa Hussein Ali (à gauche) a dirigé la République du Koweït pendant 6 jours en août 1990 avant que le pays ne soit annexé à l'Irak par Saddam Hussein (à droite).
Le Moyen-Orient souffre d'un besoin de faire disparaître les pays stables. Israël est la victime potentielle la plus connue mais le Koweït a en fait cessé d'exister il y a six mois alors que le Liban, la Jordanie et le Bahreïn peuvent être engloutis à tout moment.
Les États du Moyen-Orient dépensent des sommes colossales pour leurs services de renseignements et leurs armées et créent des forces inutiles chargées de se surveiller mutuellement. À l'étranger, ils se lancent dans des achats superflus de tanks, de bateaux et d'avions. Ils consacrent des revenus exorbitants aux armes chimiques, biologiques et nucléaires et à la livraison de celles-ci. Même les groupes terroristes comme Al-Qaïda cherchent à acquérir des armes de destruction massive. Les méthodes terroristes de pointe se développent au Moyen-Orient.
L'échec économique et politique produit un grand nombre de réfugiés : depuis les années 1980, la population de réfugiés la plus importante au monde est constituée par les Afghans désormais en passe d'être supplantés par les Syriens qui sèment la pauvreté et le chaos dans les pays où ils sont accueillis. Des âmes désespérées tentent de quitter la région pour les pays occidentaux en laissant en chemin de nombreux morts. Celles qui y arrivent importent les maladies de leur région dans des pays aussi sains que la Suède et l'Australie.
Au XIXe siècle, des diplomates ont surnommé l'Empire ottoman « l'homme malade de l'Europe ». À présent, c'est le Moyen-Orient dans son ensemble que je nomme l'homme malade du monde. Il faudra des décennies pour trouver un remède aux haines, à l'extrémisme, à la violence et au despotisme qui sévissent dans la région.
En attendant l'avènement de ce processus, le monde extérieur ferait mieux de ne pas verser son sang ni son argent pour le salut du Moyen-Orient – c'est sans espoir – mais devrait se protéger lui-même contre les menaces multiples en provenance de cette région, qui vont du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) aux harems en passant par le mégaterrorisme ou l'impulsion électromagnétique.
Thèmes connexes:  Société moyen-orientale Il est permis de reposter ou de faire suivre ce texte pour autant qu'il soit présenté dans son intégralité et accompagné de toutes les informations fournies à propos de son auteur, de sa date et son lieu de publication et de son URL originale.

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