Figaro du 10-10-2013
«En trente ans de métier, je n'ai jamais vu ça!», s'exclame un avocat. Il faut dire que Bercy a fait fort. Sortie du chapeau fin août, la taxe sur l'excédent brut d'exploitation (EBE) a été intégrée dans le projet de loi de finances (PLF) 2014, présenté en Conseil des ministres le 25 septembre, avant d'être remplacée dix jours après, face à la bronca des entreprises, par une hausse de la surtaxe - de 5 % à 10,7 % - sur l'impôt sur les sociétés. Et ce, avant l'examen du budget en séance par les parlementaires…
«En trente ans de métier, je n'ai jamais vu ça!», s'exclame un avocat. Il faut dire que Bercy a fait fort. Sortie du chapeau fin août, la taxe sur l'excédent brut d'exploitation (EBE) a été intégrée dans le projet de loi de finances (PLF) 2014, présenté en Conseil des ministres le 25 septembre, avant d'être remplacée dix jours après, face à la bronca des entreprises, par une hausse de la surtaxe - de 5 % à 10,7 % - sur l'impôt sur les sociétés. Et ce, avant l'examen du budget en séance par les parlementaires…
«C'est de l'impréparation», estime Nicolas Jacquot, avocat associé
chez Arsene Taxand. Pour une réforme de cette ampleur, «il faut un minimum de deux mois de concertation, mais aussi expliquer le principe, faire les simulations financières, résoudre les questions financières, écrire le texte…» À l'arrivée, le taux de l'IS, le plus élevé d'Europe - 36,1 % des bénéfices -, va grimper à 38 % pendant deux ans.
Plus que ce niveau très élevé, les entreprises sont surtout pénalisées par une instabilité fiscale permanente. «Une taxe tous les jours, on n'en peut plus. Aujourd'hui, même l'entreprise qui marche n'ose pas investir car elle ne sait pas ce qu'il adviendra demain», s'est exclamé mardi Jean-François Roubaud, le président de la CGPME. «Une entreprise planifie sa stratégie de développement, d'investissement, de recrutement, sur trois à cinq ans.
Des mesures rétroactives
Or, elle se trouve dans l'incapacité de se caler sur un plan fiscal stable, abonde Geoffroy Roux de Bézieux, vice-président du Medef. Cette instabilité est une mauvaise tradition française: chaque année, le PLF, c'est le bouquet garni, on y découvre des nouveautés. Mais là, il y a une accélération.» Et ce «serial entrepreneur» de rappeler le virage l'an dernier sur la taxation des plus-values de cession. Le gouvernement avait finalement reculé après la révolte des «pigeons».
L'exemple de l'évolution de l'IS est symptomatique de ces zigzags perpétuels. Son taux est passé de 33,33 % en 1993 à 36,1 % aujourd'hui. «Sur cette période, l'instabilité a été permanente, avec notamment la création d'une contribution supplémentaire de 10 % de l'IS en 1995 jusqu'en 2005, d'une deuxième de 15 % en 1997 jusqu'en 1999, puis de la contribution sociale sur les bénéfices de 3,3 % de l'IS en 2000 et une surtaxe de 5 % en 2011!», rappelle Bruno Gibert, associé chez CMS bureau Francis Lefebvre.
Des «assises de la fiscalité» en 2014
Et l'avocat d'ajouter: «Concernant la déduction des intérêts d'emprunt des entreprises, on en est à la troisième mesure depuis 2007.» Les difficultés sont plus criantes s'agissant des «mesures rétroactives qui, votées en décembre, concernent toute l'année en cours», explique Nicolas Jacquot. C'est le cas de la taxe exceptionnelle de 75 % sur revenus de plus de 1 million, qui s'appliquera en 2014 sur les revenus de 2013.
Le gouvernement, qui dit miser sur la «concertation», va organiser début 2014 des «assises de la fiscalité» pour réfléchir à une «réforme structurelle». Avec l'ambition «à terme» d'obtenir «un alignement du taux de l'impôt sur les sociétés sur le taux européen», a indiqué Bernard Cazeneuve. «On peut se fixer un objectif à trois ans de retour à cette moyenne, qui est de 30 %», propose Pierre Gattaz, le président du Medef. Mais y croit-il lui-même?
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