Qu’il est difficile d’être un chaud partisan de l’Europe, de ceux qui, jugeant cette construction imparfaite, pensent qu’elle doit continuer à se réformer pour aller vers davantage d’intégration et plus d’unité. Qu’il est difficile d’être europhile, de ceux qui croient qu’après l’Europe des marchés, après l’Europe de la libre circulation des hommes, après l’Europe de la monnaie, il faut maintenant avancer vers davantage de démocratie.
C’est bien cette Europe politique-là qui doit émerger des urnes, dimanche prochain. Et comme dans tout bon système parlementaire, la majorité élue désignera celui qui aura vocation à présider la Commission. Enfin ça, c’est la théorie. Car la pratique s’annonce bien plus problématique. D’abord parce qu’il n’y a aucune chance qu’une majorité absolue se
dégage du vote des Européens, ce qui ouvrira le bal des tractations pour s’accorder sur un « vainqueur ». Ensuite parce que le candidat issu de ce marchandage pourra être refusé par le Conseil européen, autrement dit par les chefs d’Etat et de gouvernement des 28 pays membres de l’Europe. Ce sont eux qui, dans un rapport de force plus ou moins négocié avec le Parlement, auront en réalité le dernier mot. Un arrangement bancal, forcément bancal.
Le résultat de ces manœuvres est presque écrit d’avance : d’un côté prisonnier des marchandages entre dirigeants des pays européens, et de l’autre otage d’un parlement où aucune majorité nette ne se dessinera, le prochain président de la Commission arrivera diminué. Si même il n’est pas justement choisi pour sa faiblesse. C’est le paradoxe des europhiles, leur cauchemar : en l’état actuel des Traités, et compte tenu de l’état politique de l’Union, plus la démocratie avance et plus l’Europe risque de s’affaiblir.
Nicolas Beytout
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