À force de vouloir faire des économies de bouts de chandelles en taillant dans des niches fiscales utiles à l'emploi, les gouvernements successifs ont fini par enrayer la belle mécanique d'un secteur porteur… Après avoir été aidé et connu un bel essor depuis 2005, l'emploi à domicile par des particuliers -qui concerne près de 4 millions de personnes aujourd'hui: 1,3 million de salariés et 2,3 millions d'employeurs - est dorénavant en chute libre. Le nombre d'heures déclarées, qui ne cesse de reculer depuis 2011, a encore accusé une baisse de 7,8 % en 2013.
Pis, le secteur a enregistré une destruction historique de 16.500 emplois (en équivalent temps plein) l'année dernière, après la disparition de 10.668 emplois en 2012 et de 10.441 emplois en 2011, a souligné mardi la Fédération des particuliers employeurs (Fepem). Même la garde d'enfants, qui a longtemps résisté, est dorénavant sur
la brèche. Bref la belle mécanique, qui avait prospéré suite à la création de la réduction fiscale pour emplois familiaux par Martine Aubryen 1991 et la mise en place ensuite d'aides spécifiques de la branche famille, s'est grippée. Un paradoxe alors que ce système censé encourager le travail des femmes est souvent regardé comme un modèle à l'étranger.
Si la crise qui rogne le pouvoir d'achat des ménages peut en partie expliquer ce retournement, l'instabilité fiscale en est aussi largement responsable. La suppression par la droite en 2011 des 15 points d'abattement de cotisations patronales, puis la suppression par la gauche deux ans plus tard de la déclaration «au forfait» ont alourdi la note pour les particuliers employeurs. Par exemple de 10 % pour l'emploi d'une nounou à temps plein…
Les employeurs, qui ont injecté la bagatelle de 12,2 milliards d'euros en 2012 dans l'économie (9,1 de masse salariale nette et 3,1 de cotisations) s'essoufflent. Incapables de poursuivre leurs efforts, ils ont soit renoncé à leur salarié à domicile, soit réduit son nombre d'heures déclarées. Résultat, le travail au noir dans le secteur, qui était passé de 50 % en 1995 à 30 % en 2005, remonte aujourd'hui en flèche.
Face à cet état de fait, il y a urgence à enrayer le mouvement. «L'emploi à domicile est une grande masse silencieuse. Mais je m'inquiète de réactions plus violentes et je crains des mouvements imprévisibles si rien n'est fait», prévient Marie-Béatrice Levaux, la présidente de la Fepem. Pour les particuliers employeurs, la solution est simple: il faut alléger le coût du travail. Ils s'estiment d'autant plus légitimes à le réclamer qu'un allégement de 30 milliards d'euros sur trois ans a été accordé aux entreprises dans le cadre du pacte de responsabilité.
Pour compenser les hausses des années passées, la Fepem demande donc aujourd'hui une exonération de 2 euros par heure travaillée, contre 75 centimes accordés l'année dernière. Et ce, dès le collectif budgétaire de juin, afin de ne pas perdre la période de la rentrée, propice à l'embauche de salariés à domicile, et notamment de nounous pour faire garder ses enfants faute de places en crèche suffisantes. «C'est un enjeu essentiel pour les classes moyennes, un moyen d'envoyer un coup de pouce au pouvoir d'achat tout en ciblant l'emploi», affirme Marie-Béatrice Levaux.
50.000 emplois à la clé
Après Bercy mardi, c'est à Matignon que la Fepem ira plaider sa cause jeudi. «Un euro investi dans notre secteur, c'est un euro directement fléché emploi, il n'y a pas d'effet d'aubaine», souligne Marie-Béatrice Levaux. Et la patronne de la Fepem de promettre pouvoir «recréer 50.000 emplois nouveaux d'ici à la fin de l'année» si cette mesure est adoptée. Car c'est là tout le paradoxe. L'emploi à domicile recule alors que les besoins des services à la personne vont croissants entre la garde d'enfants, l'aide à l'autonomie des personnes âgées et aux devoirs des enfants, ou encore le ménage et le jardinage. Un vivier d'emplois important pour le gouvernement qui cherche, pour l'heure sans résultat, à inverser la courbe du chômage.
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