L’Europe est en panne car son moteur franco-allemand ne tourne plus. Et si celui-ci est défaillant, c’est parce que Paris a cessé de l’alimenter en carburant. Tout au long de la seconde moitié du XXe siècle, l’Union européenne s’est édifiée sur un partage d’intérêts bien compris entre la France et l’Allemagne : la performance économique de celle-là alliée à l’initiative politique de celle-ci permettaient de fonder le leadership du couple sur l’ensemble. Mais depuis lors le déséquilibre ne cesse de s’accentuer. Sa réunification, sa stabilité politique, son dynamisme et la cohérence de son projet européen fédéraliste ont achevé de propulser l’Allemagne à la tête de l’Europe. Dans le même temps, l’absence de croissance, le
chômage de masse, le refus de procéder aux indispensables réformes structurelles, l’épanouissement de forces populistes ont affaibli le partenaire français dont on aurait grand peine aujourd’hui à décrire l’ambition européenne.
Or l’Allemagne, seule, ne peut entraîner ni ne veut dominer l’Europe. Sa classe politique tout entière est convaincue, en raison du passé nazi, qu’une telle ambition serait aussi folle qu’irréalisable. Pour répondre aux défis des cinq prochaines années, l’Allemagne a besoin d’une France forte, prospère et sûre d’elle. Une France qui n’hésiterait pas à se réformer, qui s’ouvrirait sans crainte à la mondialisation, qui verrait l’Europe comme une aide et non plus comme un bouc émissaire, qui saurait que l’intégration européenne est le fondement et la garantie de la prospérité du continent. Bref, une France qui soit tout l’inverse de ce qu’elle est aujourd’hui.
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