Droguée à la dépense et indifférente aux déficits, la France s’est longtemps organisée sans souci d’efficacité. Tant qu’elle redistribuait à tout vent, elle pouvait empiler, redonder, éparpiller… bref gaspiller. Ces temps sont révolus. Et les 50 milliards d’euros d’économies promis vont obliger à un aggiornamento bien plus douloureux que les rabotages usuels. Ainsi les élus locaux s’émeuvent d’avance d’une forte réduction de la dotation de l’Etat aux communes, départements et régions. Que ne s’y sont-ils pas préparés au vu de la folle dérive des finances locales des trente dernières années ?
Ce paradoxe français mène à la faillite : alors que déficits et dette pointés par Bruxelles
agrègent les comptes de l’Etat, de la Sécu et des collectivités locales, ces dernières peuvent, sans se soucier du pouvoir central, mener grand train. En somme, à Paris la rigueur, en région les splendeurs. A Paris les crédits gelés, les embauches contrôlées, le holà fiscal ; en région les débours insensés, les effectifs pléthoriques et les impôts à gogo…
Oui, la règle d’or interdit toute dérive des déficits. Oui, l’Etat décentralisateur s’est déchargé de ses devoirs à bon compte. Oui, la loi de 2003 a consolidé le pouvoir fiscal local. Mais ces arguments ne suffisent plus à justifier un système schizophrène de déresponsabilisation générale où le décideur n’est pas le payeur qui n’est pas le contrôleur, lui-même sans autorité sur le prescripteur, etc.
Aucun pays en Europe n’a renoncé à ce point à associer les collectivités territoriales au partage des efforts induits par nos engagements européens. L’austérité, c’est maintenant et pour tous.
Rémi Godeau