Le nombre de ménages employant un salarié est passé en 2013 sous la barre des 2 millions et le volume des heures déclarées a reculé de 6,7%. Au profit du travail au noir qui s'envole.
Une année noire! Selon les statistiques de l'Acoss (la fédération des Urssaf), tous les indicateurs du secteur del'emploi à domicile ont plongé en 2013, au premier rang desquels le nombre de particuliers employeurs. Sur un an, 72.000 ont en effet disparu du radar des Urssaf qui collectent les cotisations sociales, une baisse historique de 3,2%. Résultat: le total des employeurs à domicile est passé sous la barre symbolique des 2 millions de personnes, à 1,990 million.
Plus inquiétant encore, le volume total des heures déclarées a continué de reculer: une chute de 6,1% en 2013, après celle de 4,4%
enregistrée en 2012, à un peu moins de 130 millions d'heures. Traduction? Matraqués fiscalement, les ménages ont fait leurs calculs et ont de plus en plus recours au travail au noir pour leur «personnel» de maison. Pour preuve, la baisse des heures déclarées est d'ailleurs la plus forte (-6,7%) dans l'emploi à domicile hors garde d'enfants, contre un repli de 4,7% pour la garde d'enfants à domicile. Autre signe de la montée inexorable du travail au noir ou du travail «gris» (certaines heures seulement sont déclarées), l'activité des assistantes maternelles diminue pour la première fois depuis 2004, avec un repli de 1% du nombre des heures déclarées et de 0,3% de celui des particuliers employeurs.
Les causes de cet effondrement sont identifiées. Si l'impact de la crise sur le pouvoir d'achat des ménages est réel, les arbitrages législatifs successifs ont aussi fragilisé les équilibres financiers des familles: suppression de l'abattement de cotisation de 15 points pour les employeurs ; suppression de la déclaration au «forfait» en 2013 (qui a touché 30% des employeurs) ; plafonnement des niches fiscales à 10.000 euros de réduction d'impôt… Autant de mesures pénalisantes que n'aura pas compensé la réduction de charges, accordée l'année dernière, sous forme d'un abattement de 75 centimes de l'heure.
«Nous assistons à une marche arrière sévère pour l'emploi à domicile, qui revient d'un seul coup à ses niveaux de 2004. L'année dernière nous avons tout simplement perdu des acteurs économiques, qui ont fait des arbitrages en faveur du travail non déclaré», regrette Marie-Béatrice Levaux, présidente de la Fepem, qui regroupe les particuliers employeurs. Elle compte désormais plus que jamais sur son «pacte emploi domicile» qui vise à recréer 50.000 emplois et à recruter 150.000 nouveaux employeurs, à condition d'obtenir de l'exécutif qu'il porte à 2 euros l'abattement par heure travaillée. Une demande déjà formulée en 2013 mais qui a été refusée.
80.000 emplois détruits
Au sein des entreprises de services à la personne, l'instabilité réglementaire est aussi pointée du doigt pour expliquer l'envolée du travail au noir. «Toutes ces heures qui ne sont plus déclarées n'ont pas disparu, elles correspondent toujours à un besoin», jure Maxime Aiach, président de Fédération des entreprises de services à la personne et du groupe Acadomia, en rappelant les deux hausses successives de TVA qu'a subies le secteur ces deux dernières années. Alors que près de 80.000 emplois ont été perdus en 2013 dans ces entreprises, il milite pour une stabilité des règles du jeu, davantage de flexibilité dans la mise en œuvre de la loi sur le temps partiel et une baisse du coût du travail.
Fondateur de O2, le leader des services à la personne, Guillaume Richard estime cependant que la montée du travail au noir n'est pas une fatalité: «Nos prestations sont 15% plus chères que le travail non déclaré, mais nous arrivons à les justifier auprès de nos clients puisque nous affichons 20% de croissance», assure-t-il. Sa solution? Mieux communiquer sur les atouts du travail déclaré, y compris auprès des employés. «Le premier bénéficiaire reste le salarié», rappelle-t-il.
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