Par Cécile Philippe Institut Molinari
Oui car le sujet de la retraite a été trop souvent traité sous un angle purement politicien, ce qui contribue à entretenir un statu quo intenable.
Relire Jaurès nous montre qu’on peut être à gauche et défendre la capitalisation. Il suffit de se replonger dans l’Humanité de 1909. Jaurès y expose comment la capitalisation « en soi est parfaitement acceptable » et peut constituer « un gage plus certain, une base plus solide » pour l’assurance retraite. Pour le cofondateur du Parti socialiste français (1902) et de l’Humanité (1904), la capitalisation « peut même, bien maniée, par un prolétariat organisé et clairvoyant, servir très substantiellement la classe ouvrière ».
En effet, en rendant la classe ouvrière « à la fois capitaliste et salariée », elle lui permettrait de recevoir « tout le produit social qui résulte de la mise en œuvre de ce capital par le travail ouvrier ». En permettant au salarié de devenir épargnant, elle lui donnerait les moyens de préparer ses vieux jours tout en s’appropriant une partie du rendement du capital.
D’où l’idée – qui n’est pas neuve – d’introduire une dose de capitalisation dans le système de retraites actuel… Reste à respecter j’imagine certaines conditions pour que ça marche…
Il s’agit de faire du neuf avec de l’ancien et de cesser de matraquer l’épargne. Depuis plusieurs années les
pouvoirs publics ont taxé les produits dédiés à la retraite. On se souvient tous du forfait social, prélèvement de 2% instauré sous Fillon et porté à 20% sous Ayrault.
Ensuite, cessons de faire des différences. Il n’y a pas de raison d’attaquer les mécanismes d’épargne du privé, tandis qu’on oblige par ailleurs le public à capitaliser, avec l’ERAP, un fonds de pension qui ne dit pas son nom.
Mais donc le système par répartition n’est absolument pas pérenne tel qu’il existe aujourd’hui ?
Non. Nous avons fait preuve d’une imprévoyance collective majeure. Tous les experts savent que les régimes de retraite par répartition constituent des bombes à retardement. Avec de moins en moins d’actifs et de plus en plus en plus de retraités, la répartition est condamnée à distribuer des retraites de plus en plus maigres. Les réformes initiées en France depuis la fin des années 1980 limitent l’essor des dépenses, avec à la clef des économies représentant aujourd’hui de l’ordre de 2% du PIB. Pour autant elles ne permettent toujours pas d’équilibrer les comptes et de résorber la dette implicite liée aux retraites par répartition, estimée à 3,6 années de revenu.
D’ici 50 ans, ces réformes devraient nous permettre d’économiser de l’ordre de 8% du PIB par an, en contenant les dépenses de retraite à un niveau proche d’aujourd’hui. Cela se fera par une réduction massive des pensions. En bonne logique, il faudrait que cette baisse des retraites par répartition soit compensée par une épargne retraite. Il faudrait que les pouvoirs publics – de droite comme de gauche – incitent massivement les Français à épargner, ce qui est loin d’être le cas.
Cécile Philippe est directrice générale de l’Institut économique Molinari.
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