dimanche 1 juin 2014

L’Europe et le gros animal de Platon

31 MAI 2014 par VIVIEN HOCH dans AUTRES, CULTURE, EUROPE, LA UNE, POLITIQUE, SOCIÉTÉ avec 4 COMMENTAIRES

 On racontait en Europe centrale l’histoire de trois écrivains de nationalités différentes, soumis à la rédaction d’un livre sur les éléphants : l’Allemand écrivait une énorme somme de 5 livres sur le concept d’éléphants, le Français, une pièce badine sur les éléphants et l’amour, enfin, le Tchèque, un essai tragique sur « les éléphants et la question Tchèque ».
 Ceci nous pas pour remarquer que Prague est une ville où il fleure bien plus ce que nous aimons de l’Europe que l’extrême majorité des quartiers de Paris, ce qui pourrait constituer un éclairage certain sur la question européenne.
Ceci pour introduire au philosophe Tchèque Jan Patocka, grand penseur de l’Europe, grand pourfendeur du communisme, grand martyr tombé sous les coups de la police politique socialiste de l’époque. Ses Essais hérétiques sur l’histoire, ses séminaires clandestins de philosophie rassemblés sous le titre L’Europe après l’Europe et surtout son immense Platon et l’Europe sont des mines de renseignement sur le destin spirituel de l’Europe. 
Pourquoi « Platon et l’Europe » ? Parce qu’il y a quelque chose de platonicien dans la civilisation européenne, un mauvais platonisme (l’oligarchisme) et un bon platonisme (le souci de l’âme)…
  
L’oligarchisme républicain
C’est dans La République que Platon montrait sa préférence pour l’aristocratie (le pouvoir des meilleurs) au détriment de la démocratie. Platon ne faisait clairement pas confiance au peuple, qu’il qualifiait de « gros animal », et qui, dominé
par les passions, préférait suivre les démagogues (les sophistes, les politicards) qui le menait à sa perte plutôt que de suivre les voies de la raison et de la connaissance.
Cette méconfiance dans le peuple se retrouve dans la manière dont se mène, aujourd’hui, la construction européenne. Et notamment dans son rapport, justement, au peuple.
Voyez Charles de Gaulle qui, en onze ans (1958-1969), a accepté de se soumettre à la volonté du peuple par cinq référendums, le dernier l’ayant conduit, désavoué, à quitter ses fonctions de lui-même.
 Ses successeurs n’ont pas eu les mêmes scrupules, car seuls 4 référendums ont été tenus jusqu’à 2004, soit en 35 ans ! L’absence de recours aux référendums conduit à une sorte de « monarchisme républicain » renforcé par la décision de procéder à l’élection du parlement après celle du président.  
« Monarchisme républicain » qui devient européen : c’est la République Française influence la construction européenne dans tous ses travers jacobins et bureaucratiques. Quel meilleur exemple que la Commission européenne où l’ont peut admirer la dialectique perverse de « ceux qui savent» face aux « gros animaux » qui peuplent l’Union européenne ? Et quoi de plus déroutant, pour tout ce système de représentants qui ne représentent plus rien, que de demander enfin la parole au peuple ! Et donc, si la ligne de sortie de l’Union Européenne domine, attention à ce ne pas reproduire l’administrocratie bruxelloise au plan Français…
  
Ce peuple européen qui se définit par le souci de l’âme.
Platon dans son Apologie de Socrate. Socrate assurant sa défense, accusé par Athènes, plaidait sa cause ainsi : 
« Je ne fais rien d’autre qu’aller par les rues pour vous convaincre, les jeunes, les vieux, tous tant que vous êtes, que le souci de l’âme passe avant celui du corps et de l’argent ».
C’est pourquoi Patocka dit que « L’Europe est un concept qui repose sur des fondements spirituels ». L’Europe est déjà en gestation dans la Grèce antique à travers la metanoïa socratique, la conversion de l’âme vers l’idée, le fait de s’élever des basses occupations matérielles vers le monde des idées, de la culture et du divin.

***

Permettez-moi donc de saluer, avec Platon et avec Patocka, avec l’Europe entière et ce qu’elle comporte de noble, le peu de partis politiques qui ont mis en avant ce souci de l’homme dans cette campagne des Européennes.

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