Les grands patrons ont l’art de se mettre dans des situations impossibles. Le cas Philippe Varin en offre une fois de plus une parfaite illustration. Dans toute sa brutalité, l’affaire des 21 millions d’euros de retraite-chapeau est indéfendable. Personne n’aura la moindre chance d’être audible sur le plus petit argument en défense de ce dossier : somme énorme, contexte social brûlant, bilan contesté de ce patron. Il n’en fallait évidemment pas plus pour que le monde politique, gauche et droite réunies, s’empare avec gourmandise de ce dossier grâce auquel on peut si facilement « flatter les aspirations à la facilité ou les préjugés du plus grand nombre pour accroître sa popularité » (selon la définition de la démagogie donnée par le Larousse).
Et tant pis si on confond allègrement une rente avec un parachute doré. Tant pis si, taxe
après sur-taxe, les 21 millions mis en réserve par l’employeur ne seront plus que 7 pour l’ex-patron, étalés sur deux décennies. Tant pis si cet avantage respecte la loi et les codes en vigueur. Tant pis si l’Etat représenté au conseil de PSA-Peugeot-Citroën a évidemment eu connaissance de ce contrat sans rien trouver à y redire.
Mais surtout, tant pis si ce genre de situation est inévitable. On ne convainc pas quelqu’un de prendre un poste aussi exposé, un emploi aussi éjectable, une mission aussi écrasante, une exposition aussi mondiale sans rémunération à la hauteur du risque. Bien entendu, les « packages » doivent être modulés en fonction des résultats, et les échecs sanctionnés –ce fut le cas pour Philippe Varin qui va en outre renégocier. Mais une fois de plus, c’est l’image des patrons qui en sort abîmée, le fossé entre une élite économique et le plus grand nombre qui en est élargi, et les chances du pays de se mobiliser autour de la notion de risque et de réussite économique qui s’en trouvent amoindries.
Nicolas Beytout
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