Forgé il y a un siècle pour justifier le démantèlement des Empires austro-hongrois et ottoman, consacré par la décolonisation, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes va-t-il trouver ses limites dans l’Europe du XXIe siècle ? Le Royaume Uni, pierre angulaire de la sécurité européenne depuis au moins un siècle, est menacé d’éclatement, et l’effet domino risque d’emporter une partie du continent. Or, c’est une utopie de croire que l’Europe pourrait devenir une série de micro-Etats homogènes sur les plans culturels et ethniques, qui commerceraient les uns avec les autres dans la paix et la sérénité. Le potentiel déstabilisateur d’une série de sécessions régionales ne doit pas être sous-estimé.
On peut gloser sur les responsabilités de cette impasse : la mondialisation qui favorise le réveil des identités et le repli sur soi ; Bruxelles qui a joué les petits Etats contre les gros et
les régions contre les capitales ; les gouvernements nationaux qui n’ont pas su gérer les forces centrifuges ; les régions riches à l’identité culturelle forte qui ne veulent plus payer pour les moins bien loties. Tout cela s’explique.
Il reste que le moment est bien mal choisi pour remettre en cause l’ordre européen. Car le monde dans lequel nous vivons n’a probablement jamais été aussi dangereux depuis la fin des années 30. Entre une Russie en quête désespérée de sa puissance perdue, un Moyen-Orient proche du point de fusion, un Sahel en pleine déliquescence, comment l’Europe pourrait-elle imaginer baisser la garde et s’en sortir sans dommages ? Le fait que tout cela ne suscite pratiquement aucune réaction de nos gouvernants est préoccupant. Il ne reste plus qu’à s’en remettre à la sagesse des peuples, en espérant qu’ils choisiront la sécurité et la prospérité, et donc la liberté, contre l’égoïsme, le communautarisme et l’illusion.
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