Manuel Valls peut-il réussir ? Il est bien sûr trop tôt pour le dire. Trop tôt pour savoir si les actes suivront les mots. Trop tôt pour mesurer si le choc de confiance attendu ne mutera pas – une fois de plus – en pschitt de défiance, par excès de synthèse élyséenne. Trop tôt surtout pour évaluer si, La Rochelle maintenant passée, le social-libéralisme décomplexé du Premier ministre se révélera idéologico-compatible avec le socialisme d’Epinay. Gare aux désillusions ! Chacun pressent pourtant que si rien n’est joué, les lignes ont déjà bougé. Sur l’offre politique, la manière de gouverner, la relation au pouvoir.
Le dos au mur, le Premier ministre se voit en héraut des modernes contre les archaïques.
Comme Matteo Renzi, il rejette d’un même mouvement un clivage droite-gauche usé, censé opposer offre à demande, ménages à entreprises, Etat à marché ; un dogmatisme nourri du déni de réalité ; le zigzag idéologique, les renoncements honteux et autres compromis boiteux au profit de la clarté et de l’autorité… Le voilà bien dans la ligne de Tony Blair pour qui il n’y avait que deux sortes de politiques : celle qui fonctionne et celle qui échoue. Et le voilà bien loin de la doctrine d’un PS perdu dans ses fumées révolutionnaires, persuadé d’avoir raison parce que politiquement majoritaire…
Dans cette posture de la dernière chance, Manuel Valls prendra des coups. A gauche, sur son positionnement, Cécile Duflot dénonçant déjà son « blairo-thatchérisme ringard ». A droite, pour absence de résultats. Mais le combat le plus ardu sera sans doute de persuader une opinion sceptique et désemparée qu’il n’est pas trop tard pour faire ce pari vallsien.
Rémi Godeau
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