Oublié le briseur de tabous ! Endormi le réformateur permanent ! Envolé le social-libéral offensif… Prononcer deux discours de politique générale à cinq mois de distance, c’était s’exposer au piège de la comparaison. Valls I, Valls II, même combat ? Pas vraiment. Comme il a changé, le Premier ministre, après ce semestre délétère ! En avril, Valls faisait du Valls. En septembre, Valls commence à faire du… Hollande. Passons sur son abus d’anaphores. Sur cette manière décomplexée de s’attribuer la baisse de l’euro pour mieux dissimuler notre crasse impuissance en Europe. Ou encore sur cet art du compromis laborieux à propos du calendrier électoral.
Il y a plus préoccupant. Happé par l’impopularité du Président, le Premier ministre adopte
cette manie qui consiste à opacifier après avoir clarifié, à zigzaguer après avoir fixé la ligne. Il annonce la cohérence et organise l’ambiguïté ; il promet le choc et prépare le pschitt. A l’hymne à la politique de l’offre succède ainsi une ode démagogique à l’Etat et à notre modèle social, pourtant en faillite. Au rappel strict du respect de nos engagements européens se substitue un appel usé à un « dialogue exigeant avec l’Allemagne ».
On comprend cette métamorphose : Manuel Valls ne s’adressait plus aux Français, mais aux frondeurs, actant en creux la paralysie accrue de l’exécutif faute d’assise politique. Sans résultat sur la croissance et le chômage, voilà un chef du gouvernement désormais sur la défensive, obligé d’en rabattre, d’invoquer – signe d’un proche immobilisme ? – le « ni-ni » (ni impôts, ni économies supplémentaires). Bref, contraint de tenir plutôt que d’avancer.
Rémi Godeau
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