La
France est rappelée à l'ordre par le Conseil de l'Europe sur la corruption.
L'organe anti-corruption du Conseil déplore des "pratiques
inacceptables" et recommande notamment de réformer "en
profondeur" le recours aux assistants et collaborateurs parlementaires et
les 385.000 euros d'"indemnité représentative de frais de mandat"
attribuée à chaque député et sénateur.
Dépenses des élus opaques, risques d'emplois fictifs ou occupés
par des "personnes inappropriées", liens étroits entre économie et
politique et "lobbying déguisé", corruption des juges, secret -défense
sans limites claires : non, cette description ne s'applique pas au Cameroun ou
à la Corée du Nord, pays parmi les plus corrompus au monde, mais bien à la
France. L'Hexagone a en effet été épinglé par le Groupe d'États contre la
Corruption (Greco) du Conseil de l'Europe, qui a appelé lundi 27 janvier la
France à édicter des règles plus strictes pour améliorer la prévention
de la corruption de ses parlementaires, juges et procureurs.
Dans son dernier rapport de 64 pages sur la France, le Greco
demande à Paris des "améliorations
urgentes". Sont ciblés les
parlementaires mais aussi les juges : le Greco appelle notamment à une
réforme qui permettrait de renforcer la formation et l'indépendance des
magistrats des tribunaux de commerce et des conseils de prud'hommes, dont
l'exercice de la justice est assuré par des juges non-professionnels.
Concernant l'Assemblée et le Sénat, le Greco
pointe des "pratiques clairement inacceptables" et l'opacité des
dépenses des élus. Les parlementaires sont, remarque-t-il, parmi les plus
avantagés d'Europe : "Les rémunérations, indemnités et autres avantages,
une fois cumulés, placent les parlementaires français dans une situation
avantageuse à l'échelle européenne", notent les auteurs du rapport.
"L'emploi de (ces) moyens et ressources reste globalement peu
transparent", ajoutent-ils. L'organe anti-corruption du Conseil de
l'Europe demande de réformer "en profondeur" le recours aux
assistants et collaborateurs parlementaires afin de limiter les risques d'emplois
fictifs ou occupés par des "personnes inappropriées", et un usage des
fonds à d'autres fins.
Soulignant les liens étroits entre économie et politique en
France, ce "gendarme européen" estime par ailleurs que les élus
français sont exposés à un "risque de lobbying déguisé", en
l'occurrence que des personnes liées à des groupes d'intérêts occupent ces
postes d'assistants.
Le Conseil de l'Europe pointe également les quelque 385.000
euros d'"indemnité représentative de frais de mandat" (IRFM) attribuée
à chaque parlementaire dans le cadre d'un mandat de cinq ans,
s'inquiétant que cette enveloppe puisse servir à des acquisitions de biens
immobiliers susceptibles de fausser le patrimoine déclaré de ces élus. Le
groupe anti-corruption rappelle que les "exigences de discipline
financière" obligeraient normalement les élus à rendre des comptes, ce qui
n'est pas le cas, selon ses experts. En dépit de ces lacunes, ils saluent
"diverses réformes récentes dans la prévention de la corruption en
France".
Ils appellent aussi à "mettre en place des limites plus
strictes au secret-défense, afin de limiter les risques d'abus du dispositif
dans les affaires sensibles ou de grande corruption".
Composé de 48 États européens plus les États-Unis, le Greco est
un organe du Conseil de l'Europe créé en 1999 qui vise à améliorer la capacité
de ses membres à lutter contre la corruption.
La France dispose de 18 mois pour rendre compte des dispositions
prises en réponse aux recommandations de ce rapport.
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