À force de décevoir les uns, d’indigner les autres, François Hollande a réussi l’exploit de coaguler les mécontentements.
À force de décevoir les uns, d’indigner les autres, François Hollande a réussi l’exploit de coaguler les mécontentements dans un désir de chasser l’intrus. C’était le sentiment qui animait, dimanche dernier, le long défilé hérissé de drapeaux et de banderoles, martelant des slogans vengeurs et soulevé parfois par de vibrantes Marseillaise. Ce qui parcourait la foule avant tout et lui donnait son unité était un besoin de France, d’une France respectée dans le monde parce qu’elle aura réussi à redonner à ses forces vives le goût du travail et la fierté de leurs valeurs.
Une manipulation de l’information a visé à mettre l’accent sur les incidents qui ont marqué la fin de la manifestation. Il est clair que le ministère de l’Intérieur, récidiviste en la matière, n’a rien
négligé pour permettre aux médias de donner une image extrémiste et violente d’une manifestation qui s’était déroulée dans le calme et la ferveur. La fin du cortège avait été imposée sur la place Vauban – une demi-lune –, barrée par les Invalides, et dont toutes les issues étaient bloquées par des forces de police en surnombre. Il s’agissait d’installer une nasse, d’y augmenter la pression et sans doute d’y commettre des provocations et des incidents afin de pouvoir brandir la « preuve » des 250 interpellations répétées en boucle pour ternir l’image de l’événement.
Vers 17 h 30, j’ai tenté de quitter le périmètre pour regagner ma province. Un cordon de gendarmes mobiles fermait le boulevard des Invalides sauf sur le trottoir opposé à l’édifice. Un officier m’a empêché de sortir par cette issue. J’ai découvert avec stupeur que le barrage refoulait les piétons vers l’intérieur. Deux observations : on ne comprend pas la logique qui consiste à interdire à un piéton isolé de quitter une manifestation sauf à vouloir augmenter la température du chaudron. La seule solution résidait dans la station de métro Saint-François-Xavier où la foule, filtrée par la police, passait par vagues. Dans les escaliers, aux portillons, c’était la bousculade dans l’affolement des agents de la RATP dépassés par la situation.
Là encore, paradoxalement, les forces de l’ordre créaient donc du désordre et de l’insécurité. Mais la seconde remarque ne porte plus sur la cohérence, mais sur le droit. Entraver sans discernement la libre circulation d’un piéton sans arme, qui présente une pièce d’identité avant même qu’on lui demande, et qui cherche à quitter l’espace où se situe le risque de trouble à l’ordre public, est à l’évidence une atteinte à la liberté constitutionnelle d’aller et de venir. Les provocations policières et les échauffourées qui ont suivi n’ont fait que souligner l’usage peu républicain que le ministre de l’Intérieur fait de ses pouvoirs. Le slogan de « dictature socialiste » avait pris tout son sens.
Lorsqu’on compare le déploiement considérable des forces de l’ordre et leur étrange utilisation aux résultats du ministre dans la lutte contre la délinquance, on se dit que les sondages qui lui sont encore favorables n’ont aucun fondement. C’est le même ministre qui porte atteinte à des libertés fondamentales et qui affiche après 18 mois de règne une augmentation de la délinquance, notamment des cambriolages (+ 4,7 % en zone police et 6,4 % en zone gendarmerie), des vols à la tire (+ 12 % partout) souvent accompagnés de violences. Les Français seront ravis d’apprendre que les cambriolages et les homicides se font davantage à la campagne… « Les résultats sont là », a osé le ministre. Le vrai problème, pour les Français, c’est que lui soit encore là.
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